“Rassemblement. Loin d’une consigne militaire, le mot d’ordre doit servir l’avenir de nombreuses régions européennes, autonomes ou non. C’est la conviction de Marco Deplano, expert en droit européen, correspondant au journal The Post Internazionale, à Rome, spécialisé dans les affaires européennes et ancien chargé de communication au Parlement de Strasbourg.
Le jeune homme de 29 ans milite pour la création d’un collège transnational Sardaigne et Corse, à l’occasion des élections européennes de 2024.
“Il est trop tard pour les prochaines qui auront lieu en mai 2019 mais il faut agir dès maintenant pour l’échéance dans six ans”, explique-t-il. Qu’est-ce qu’un collège transnational ? Un “machin” supplémentaire comme sait les créer la technocratie européenne ? Pour répondre à la question, il s’agit d’expliquer le fonctionnement des instances politiques. Tous les cinq ans, les Européens renouvellent leurs représentants au Parlement. Ces élections se basent sur des normes nationales des différents États de l’Union européenne. “En Italie, cette loi mécontente car elle organise les élections à travers des regroupements entre des territoires aux caractéristiques démographiques et linguistiques très différentes. Grâce aux diverses modifications de cette loi ces quarante dernières années, certaines régions à autonomie spéciales ont pu bénéficier d’une représentation au Parlement de Strasbourg mais pas la Sardaigne”, développe Marco Deplano.
Mieux représentés
Encore aujourd’hui, la grande île soeur de la Corse partage le collège des îles italiennes avec la Sicile. “À cause d’une différence de population trop importante entre les deux (près de 5 millions d’habitants pour la Sicile, 1,6 million pour la Sardaigne), argumente l’expert en droit européen, le système actuel pénalise la Sardaigne. Plus les Siciliens sont nombreux à voter, moins les Sardes peuvent élire des europarlementaires de leur territoire.” Un problème encore plus saillant pour la Corse qui fait partie de l’un des huit collèges en France, le Sud-Est, formé par les régions Paca et Rhône-Alpes.
Un nouveau collège transnational corso-sarde serait donc la solution afin que les deux îles soient mieux représentées au Parlement. Et un événement qui secoue l’Europe en ce moment pourrait bien faciliter les choses. “Avec le Brexit, les 73 sièges du Royaume-Uni seront à redistribuer, affirme Marco Deplano. La proposition, approuvée dans la commission Afco de Bruxelles en février dernier, voudrait partager 27 de ces sièges entre les 14 États membres sous-représentés. Les 46 autres postes pourraient constituer le territoire fertile sur lequel édifier les collèges transnationaux.” Marco Deplano est persuadé que les deux îles, aux caractéristiques et problématiques si semblables ont tout intérêt à créer ce collège unique, “début d’une collaboration plus ample à travers la formation d’un nouveau groupe européen de coopération territoriale (GECT)”. L’objectif ? “Surmonter les obstacles liés aux normes des États d’appartenance.” À l’heure où l’on parle beaucoup de réforme des institutions européennes, la clef demeure encore la volonté politique des représentants corses et sardes. Et des États qui ont le dernier mot…”
Da Corse Matin 05/08/2018